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Philippe Hériat - Retour sur mes pas (1959)
J'ai fait six ans d'études parler de mon arrière- Philippe
au lycée Lakanal. On grand-mère. Je me sou- Hériat
m'avait mis en pension à viens même d'une très
Bourg-la-Reine, chez une vieille personne qui l'avait Famille Payelle à Berck-Plage
dame professeur au mê- connue à Frapesle et qui
me établissement. La rai- faisait allusion, incidem- Les «Dix» peints par Bernard Buffet en 1956
son de cette décision était ment, au "temps de De gauche à droite, assis : Jean Giono,
ma santé, mais je crois monsieur Honoré". Je Roland Dorgelès, Francis Carco.
qu'une idée de principe ne compris que plus tard Debout : Gérard Bauer, Alexandre Arnoux,
s'y ajoutait : un enfant, qu'il s'agissait de Balzac André Billy, Philippe Hériat, Pierre Mac Orlan,
pensait-on, travaillait et d'un temps, en somme, Raymond Queneau, Armand Salacrou
mieux hors du toit pater- historique.
nel. Cette exclusion, que
je ne sus ni accepter ni Mes parents peu à peu,
combattre, me coûta pour les vacances, préfé-
beaucoup et me marqua rèrent la montagne et le
d'une empreinte vivace. bord de la mer. Ils se défi-
rent de cette "campagne"
Les vacances cependant que, depuis, j'ai tenté de
me faisaient retrouver le racheter mais en vain.
Berry, à Nohant-en- D'elle aussi j'ai gardé une
Graçay, où ma famille plaie ouverte. Il y a quel-
avait conservé une petite que trente-cinq ans que le
propriété. Pompeusement courage me manque d'al-
appelée le château par les ler revoir le village et, au-
gens du village, elle n'était tour du grand jardin, la
qu'une maison bourgeoi- clôture de plaques de ci-
se, agrémentée d'un jar- ment qui, paraît-il, a rem-
din, d'un verger, d'une ri- placé les haies vives d'au-
vière et d'un pré. Là Zul- trefois. Je n'ai même ja-
ma Carraud, à peu près mais osé retourner là-bas
ruinée, s'était établie en sur le papier et toucher du
1850, après avoir dû ven- bout de ma plume au Ber-
dre son domaine de Fra- ry de mon enfance. Lors-
pesle, près d'Issoudun, où que j'eus par exception,
Balzac était venu travail- dans un roman, à placer
ler. A la fin de sa vie, elle quelque personnage au
passait encore ses étés à milieu de la campagne
Nohant. Ceux de mon en- française, je préférai faire
fance m'y rendaient la li- sur la carte un petit écart
berté, au milieu des ani- pour éviter Nohant-en-
maux et des plantes, des Graçay. L'Avallonnais de
cris de la basse-cour, des L'Innocent, le Sancerrois
chansons paysannes et de Famille Boussardel
des bruits d'essieux des n'en sont que des trans-
carrioles. Plus souvent positions nostalgiques.
qu'à Paris, j'y entendais