Page 14 - PetiteJeanne
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La mère Nannette fait la lessive.

Deux jours après, la mère Nannette dit qu'elle allait faire la lessive. Catherine lui proposa de l'entasser
pendant qu'elle mènerait ses bêtes aux champs. La petite Jeanne alla toute seule aux portes: elle eut
bien de la peine à s'y décider; mais quand sa mère lui eut fait comprendre que, si elle ne
l'accompagnait pas, c'était pour rendre service à la mère Nannette, la petite partit sans rien dire. Elle
rentra le soir bien joyeuse, parce qu'elle rapportait beaucoup de pain et une paire de sabots presque
neufs qu'une femme lui avait donnée; elle les avait mis tout de suite à ses pieds, car les siens étaient
tout percés.

En passant auprès de l'abreuvoir, elle s'était arrêtée pour regarder un homme qui lavait des radis et en
faisait de petits paquets. Il lui avait dit:

«En veux-tu, petite, que tu les regardes si bien?»

Jeanne baissa la tête et ne dit rien, car elle n'était pas hardie.

«Allons, lui dit l'homme, tends ton tablier.»

Et il lui en jeta une bonne poignée. La petite Jeanne le remercia et fut bien contente. La mère Nannette
lui donna du sel pour manger ses radis, et elle fit un bon souper, ainsi que sa mère.

Catherine dit à la mère Nannette:

«Je chaufferai votre lessive demain et je vous aiderai à la laver après-demain. On a beaucoup donné à
Jeanne: elle ira à l'herbe et conduira les oisons aux champs; cela vous fera gagner du temps, et vous
pourrez travailler un peu.»

La petite Jeanne va chez Mme Dumont.

Le vendredi, Jeanne, en s'éveillant, dit à sa mère:

«C'est aujourd'hui que nous devons aller chez la dame chercher les cinquante centimes; nous irons,
n'est-ce pas, maman?

--Ma fille, tu iras toute seule, car il faut que j'aide la mère Nannette à laver son linge. Tu vas même y
aller ce matin, afin de mener les oisons et la chèvre aux champs quand tu seras revenue.

--Maman, jamais je n'oserai entrer toute seule dans cette belle maison.

--Pourquoi donc, ma Jeanne? Cette dame est si bonne, que tu ne dois pas craindre de lui parler. Je vais
t'habiller le plus proprement que je le pourrai. Trouveras-tu bien la maison?

--Oh! oui: je suivrai le ruisseau jusqu'au moulin, et j'y arriverai tout droit.»

En partant, Jeanne prit un bâton pour se défendre contre les chiens qu'elle pourrait rencontrer. Elle
arriva devant la grille du jardin, et vit sous un berceau de chèvrefeuille M. et Mme Dumont qui
déjeunaient avec leurs enfants. Ce fut Isaure, la petite demoiselle aux cheveux blonds, qui vit Jeanne la
première:

«Maman, voici la jolie petite fille qui a rapporté le bracelet.»

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